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La prière, respiration du chrétien

     Comment Dieu vivifie nos âmes, nous ne le savons pas, pas plus que nous ne savons comment il vivifie nos corps : notre « vie » spirituelle, dit saint Paul, « est cachée avec le Christ en Dieu » (Col 3, 3). Mais comme la vie de notre corps se manifeste par son activité, la présence en nous du Saint-Esprit se manifeste par une activité spirituelle, et cette activité est l’esprit de prière continuelle. La prière est à la vie spirituelle ce que le battement du pouls et la respiration sont à la vie du corps : il serait aussi absurde de supposer que la vie peut continuer quand le corps est froid, immobile et insensible, que d’appeler vivante l’âme qui ne prie pas.

   Le don de la grâce que nous recevons au baptême n’est pas un pur privilège extérieur, un pur pardon extérieur dans lequel le cœur ne serait pas concerné, quelque chose qui serait une simple marque imprimée sur l’âme, la distinguant de fait de celles qui ne sont pas régénérées, comme une couleur particulière ou un timbre, mais sans rapport avec les pensées, l’esprit et le cœur d’un chrétien… La nouvelle naissance du Saint-Esprit met l’âme en mouvement d’une manière céleste, elle nous donne des pensées bonnes et des désirs bons, elle nous éclaire et nous purifie, elle nous porte à chercher Dieu : en un mot, elle nous donne une vie spirituelle, nous ouvrant les yeux de l’esprit, de sorte que nous commençons à voir Dieu en toutes choses par la foi, et que nous nous tenons en relation continuelle avec Lui par la prière.

 

Bienheureux John Henry Newman
(1801-1890), Parochial sermons, VII

 

 

    Qu’est-ce que la vie spirituelle ? La vie même de Dieu en nous. Il ne suffit pas que cette vie nous soit donnée, il nous faut l’accueillir, la cultiver, lui permettre de nous pénétrer tout entier. Pour autant, la prière est à la vie spirituelle ce que le battement du pouls et la respiration sont à la vie du corps : cessez de respirer, vous cesserez de vivre ; cessez de prier, vous cesserez de vivre spirituellement.

   On ne voit pas grandir un arbre, mais au bout de quelques années, on s’aperçoit qu’il a grandi. De même la vie reçue au baptême est-elle impalpable, mais pour peu qu’elle soit cultivée, arrosée, entretenue par la prière, on constate au fil du temps qu’elle se développe et porte du fruit : le chrétien se met à voir, à savoir et à vouloir comme le Christ. Ou plutôt, le Christ se met à voir, savoir et vouloir en son disciple : la nouvelle naissance du Saint-Esprit met l’âme en mouvement d’une manière céleste, elle nous donne des pensées bonnes et des désirs bons, elle nous éclaire et nous purifie, elle nous porte à chercher Dieu.

   Les battements de notre cœur et notre respiration ont un rythme ; la prière doit trouver le sien, pour accompagner comme en sourdine toute notre vie. C’est toute la question de l’organisation de notre prière et de son apprentissage. Nous y reviendrons.

 

Newmann (bienheureux John Henry, 1801-1890)
 Fils d’un banquier londonien, Newmann reçoit à Oxford une brillante culture classique et patristique. Il y sera l’un des animateurs du « mouvement d’Oxford » de renouveau de l’Église anglicane. Converti au catholicisme en 1845, brillant théologien, il devient cardinal en 1879.