Lundi 27 novembre 2023

Apprendre l’oraison avec les bergers

Allons à Dieu avec simplicité, oui, avec la plus grande simplicité. Laissons là les discours étudiés ; ne mettons pas trop d’importance aux raisonnements, aux méthodes et aux formules. Ces bons bergers demeurèrent en oraison tout le temps qu’ils furent à la crèche ; et au sortir de là, ils en conservèrent une impression durable, qui en fit des hommes nouveaux. Savaient-ils auparavant ce que c’est que l’oraison ? Avaient-ils lu des livres et des méthodes pour apprendre à la faire ? Observèrent-ils curieusement ce qui se passait en eux ; et raisonnèrent-ils subtilement sur les opérations de la grâce ? Rien de tout cela. Ils présentèrent leur cœur à Jésus ; ils le laissèrent y agir librement ; ils ne firent que coopérer à son action, sans la gêner ni la traverser par des retours intéressés sur eux-mêmes. Ils n’étaient plus à eux dans ce moment, et Jésus disposait à son gré de leur âme tout entière. Entrons dans les dispositions de ces bergers ; et Jésus fera l’oraison en nous comme il la fit en eux. Notre mal est que nous prétendons la faire par nos propres forces, ou du moins que Dieu la fasse en nous suivant nos idées et nos désirs.

Jean-Nicolas Grou (1731-1803), L’intérieur de Jésus et de Marie, VII

MÉDITER :

« Les bergers savaient-ils auparavant ce que c’est que l’oraison ? Et voilà qu’ils le savent aujourd’hui : « présenter son cœur à Jésus et le laisser y agir librement. »

L’oraison est centrale dans une vie chrétienne, car elle est justement notre entrée dans le mystère de Dieu : sans elle, nous ne serons jamais chrétiens que « par nos propres forces », évacuant d’avance le surnaturel et la grâce, qui ne peuvent venir que de Dieu.

Bien souvent, nous renonçons à une vraie vie spirituelle ; nous ne savons pas comment nous y prendre, nous croyons que c’est l’affaire des illuminés, ou au mieux des moines ou des prêtres (plût au ciel !)… Alors, « entrons dans les dispositions de ces bergers ; et Jésus fera l’oraison en nous comme il la fit en eux. »

L´Auteur :

Grou (Jean-Nicolas, 1731-1803)

Né à Calais, le jeune Grou entre chez les jésuites à 15 ans. Brillant professeur de lettres à La Flèche, il s’exile en Lorraine lors de la suppression de la Compagnie en 1763. Bientôt à Paris, sa rencontre avec la visitandine Pélagie Lévêque l’ouvre à la mystique. Il se partagera désormais entre la direction spirituelle et la rédaction d’ouvrages connexes, notamment en Angleterre, car la Révolution française le force à un nouvel exil à partir de 1792.